Mourir d’ennui au travail : dites NON !
Il n’y a pas que le stress qui éreinte les
travailleurs. Il y a aussi l’emmerdement : après le burn-out, voici le
"bore-out", syndrome d’épuisement professionnel par l’ennui. Que faire
quand celui-ci vous prend dans ses griffes ?
La réponse de Benjamin Fabre...
La réponse de Benjamin Fabre...
Symptômes
« J’ai envie de bosser comme de me pendre. »
C’est votre nouveau refrain. Poursuivi du lundi au vendredi par un
spleen grandissant, vous avez le sentiment de vous épuiser à la tâche.
Trop écrasante, la tâche ? Trop harassante ? Non. Trop chiante. Rien que
d’y penser, vous avez envie de bailler aux corneilles. Et bailler du
lundi au vendredi, on a beau dire, ça fatigue. Bienvenue dans le monde
merveilleux du "bore-out".
C’est sans doute à cause du progrès
technique. Avec la mécanisation du travail, l’industrialisation, la
digitalisation et toutes ces joyeusetés, il a fallu inventer de
nouvelles besognes pour occuper les gens. D’où la prolifération de
tâches essentielles (contrôle, pilotage…) et de fonctions hautement
indispensables du genre "Chef de projet", "Responsable support" ou
"Coordonnateur multi-métier"… De l’éclate en bâtonnets. Question : quels sont les métiers épargnés par le syndrome de l’ennui ?
D’après les chercheurs, tous les jobs qui consistent à s’occuper
d’autrui (médecins, assistantes sociales…). Un constat instructif quand
on se place du point de vue de l’entreprise.
Le "bore-out" fonctionne en cercle vicieux.
D’abord, on s’ennuie au bureau. Les tâches confiées sont si emmerdantes
qu’on fait en sorte de s’en farcir le moins possible. Du coup, on
s’ennuie encore plus. On déprime. Mais, comme on tient à garder son job (ce qui est assez curieux pour un job assommant),
on met en place tout un tas de stratégies finaudes pour avoir l’air le
plus stressé possible (parler très fort, marcher à toute blinde dans les
couloirs, déjeuner d’un sandwich triangulaire devant son écran). Et
pendant ce temps-là, il faut bien s’occuper : Facebook,YouTube, sites
d’information, jeux vidéo… Lesquels accroissent violemment le sentiment
d’inutilité puisqu’on y voit, pour l’essentiel, des gens qui se bougent
le derrière (copains hyperactifs, célébrités sous les feux de
l’actualité, superhéros…). Et on déprime encore plus… Bref, de manière
paradoxale, on est furieux de son propre ennui mais on ne fait
strictement rien pour en sortir.
Traitement
Je ne le dirai pas deux fois. Pour faire
exploser ce cercle vicieux, la seule solution est de vous en prendre à
vous-même. Tant que vous penserez que c’est la faute du système, de la
législation ou du réchauffement climatique, vous resterez dans les
pattes molles et cotonneuses du bore-out.
Qui s’est fourré dans ce corner ? Qui a accepté ce poste navrant
dont il était cousu de fil blanc, dès le départ, qu’il vous procurerait
autant d’émotions fortes qu’un matelas Bultex ? Qui a mis les valeurs
de "confort", de "stabilité" et de "sécurité" au centre de ses choix
professionnels, malgré leur (puissante) odeur de naphtaline ? Qui s’est
laissé amadouer par le menu complet CDI + primes + comité d’entreprise +
chèques-déjeuner + 7 semaines de vacances (9 pour les banquiers) en se
félicitant d’avoir trouvé "la bonne planque" ? Qui essaie chaque matin,
au prix d’efforts argumentaires phénoménaux, de se convaincre que ces
"avantages" compensent l’extrême répétitivité de son boulot et son
absence totale de challenge ? Le pape ?
Bien sûr que vous avez besoin d’aventure. Être en déséquilibre professionnel, chaque jour, ce n’est pas inconfortable, c’est vital.
Les tâches intéressantes pullulent, elles sont simplement squattées par
des personnes un peu plus toniques que vous. Au lieu de vous accrocher à
un job qui vous tue à petit feu, prenez le risque de faire quelque
chose. Quelque chose d’autre. Et je parie que vous savez très bien quoi.
Par Benjamin Fabre, chroniqueur et écrivain
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire